jeudi 24 novembre 2011

Le shôjo en kit, partie 3.2

(Rappel, les extraits de mangas se lisent de droite à gauche)


Nous en sommes donc à créer de la tension et des obstacles à partir de rien. Après la "fausse embrouille", je vous propose :


2 Le mais-non-en-fait (appelé aussi le concept du « un pas en avant, quatre pas en arrière ») :
Nous avons eu une pseudo tension, qui a été réglée. Mince, plus d’histoire possible, vous voilà bien mal en point ? Mais non, il suffit de décider que « mais-non-en-fait ». Par exemple, le héros va mettre 3 chapitres à faire comprendre à l’héroïne qu’il l’aime afin qu’elle se rassure. L’héroïne se rassure, plus rien ne se mettra en travers de leur amour si profond. Et au 4e chapitre, l’héroïne va se demander si le héros l’aime vraiment. Non parce que, si ça se trouve, mais non en fait… 
Peu importe les marques d’affection que les protagonistes peuvent se montrer, ils seront en constant manque de confiance l’un envers l’autre, permettant au « mais-non-en-fait » de s’épanouir sans fin.

>>Concept valable pour à peu près tout ce qui aura été établi par le héros ou l’héroïne précédemment. Car oui, n’hésitez pas à remettre en cause tous les problèmes résolus jusqu’à présent. Comme ça là, hop, c’est gratuit, ça ne mange pas de pain, et ça fait des pages en plus. Rappelez-vous, les personnages changent d’avis comme de chemise avec une justification plus ou moins valable (vous comprenez pourquoi on a fait d’Higuratoshi une girouette en matière de comportement).


"Je te quitterai jamaiiiiiiiis"

(Peu après :)
"Finalement je te quitte (encore)."

3 La tension imaginaire :
Concept qui rejoint les deux précédents et s’y entremêle. On l’a vu, Sakumi (et parfois Higuratoshi) aime à se faire des films. Abusez-en, personne ne vous le reprochera et n’hésitez pas à le faire même quand il n’y a rien. Je veux dire, vraiment rien. Précédemment, l’excuse bancale c’était la perte d’un cadeau ou une vague scène ambiguë. Mais en fait, c’est possible avec du rien de rien.

Par exemple, un matin Sakumi décide qu’elle ne mérite pas Higuratoshi, il est trop bien pour elle, ah lala, quand même. Hop, elle ne lui parle plus : « tension imaginaire » combinée au « mais-non-en-fait » et qui entraîne une « fausse embrouille ». Higuratoshi peut faire de même, et ainsi de suite. Action ! Tension ! Obstacle. Le tout pour une somme modique proche du zéro absolu que maîtrise si bien Hyôga.

Par exemple encore, Sakumi peut se repasser en boucle la moindre connerie qu’a pu lui balbutier entre 2 cours le héros (« il était bon le sandwich au thon d’hier… ») pour la retourner dans sa tête et se torturer dessus en donnant l’impression qu’il s’agit de quelque chose de décisif. Grossissez le trait, le moindre petit machin doit paraître incroyable, dramatique. Même le "rien" :

"Han ! Il refuse les avances d'une nana ! Il ne se passe rien. De rien. Bon, je vais psychoter..."


4 La lenteur d’esprit (aussi appelée « lapin compris ») :
Quoiqu’il arrive, moins l’héroïne comprend ce qui se passe et/ou les intentions du héros, mieux c’est pour le déroulement de l’action.
C’est encore un concept lié aux précédents, qui se combine avec cette idée d’absence de logique et qui est vaguement justifié par la bêtise crasse… l’innocence de votre héroïne. La lenteur d’esprit de votre héroïne permet à l’action de durer indéfiniment (elle ne va pas comprendre ce qui se passe, va toujours s’expliquer quelque chose d’évident par ce qu’il y a de moins évident, ne va pas voir les marques d’amour du héros etc. Je pense que tout le monde a déjà en tête Skip Beat ou Arakure, des chefs d’œuvre en la matière).

"Il veut que je n'ai d'yeux que pour lui mais ça ne veut sans doute rien dire. Il veut juste m'éviter de rêvasser, ça ne peut être que ça."

5 La lenteur d’action :
Encore une fois, c’est lié à l’absence de logique et au reste. Par exemple, si vous commencez à trouver le temps long et décidez que ça y est là, assez ri, les héros vont sortir ensemble. Ce n’est bien sûr qu’une ruse pour ne pas endormir le lecteur. Car hahaha, nous sommes dans le monde magique du shôjo où « sortir ensemble » n’est qu’un concept flou qui ne renvoie pas forcément à du concret. Vos personnages « sortent ensemble » mais ça ne veut pas forcément dire qu’ils sortent ensemble (vont au ciné ou autre), encore moins qu’ils s’embrassent, et alors qu’ils couchent, je vous raconte même pas.

Ainsi, si une 1ère étape va être « tu es ma petite copine », il va bien falloir 5-6 étapes avant qu’il y ait la précision du « et je t’aime bien, au fait » et enfin encore 5-6 étapes avant de passer à « et je peux euh… t’embrasser ? »

"Je t'aime. Tu m'aimes. On passe à l'étape suivante ?" "Celle où on va au parc d'attraction ?" "Non, celle où on décide de s'aimer ensemble" "Ooh... pas con..."

Et ce n’est pas parce que vos personnages sortent ensemble qu’ils ne seront pas tous gênés/coincés au moment de se parler l’un à l’autre (ce qui va leur permettre de s’ignorer d’ailleurs et de créer des obstacles imaginaires, encore). N’oubliez pas les étapes de la St Valentin (ratée/gâchée en général) et de Noël (stress des cadeaux). Prenez exemple sur Bokutachi wa shitte shimatta qui aurait pu me servir à lui-seul à illustrer l’intégralité des deux articles du jour. Il aura droit à sa petite review, ne vous inquiétez pas.

>> Votre gestion de ces différents concepts dépendra globalement du scénario que vous avez choisi, suivant que vous racontez une histoire d’amour avec de l’amour tout de suite, ou avec une « tension amoureuse » que vous souhaitez faire durer (si vous avez envie d’un shôjo à moindre frais où il ne se passe rien, optez définitivement pour ce dernier choix).

Bon. Lecteur, tu as  fait le tour, tu as épuisé jusqu’à l’os les possibilités que t’offrent Sakumi et Higuratoshi (je te le dis tout de suite : non, tu ne les as pas épuisées. Il en reste encore. Mais soit, disons que tu te lasses), tu souhaites varier ? Rien de plus simple.

Si déjà, avec du rien, tes héros peuvent se prendre la tête, alors imagine quand il se passe vraiment quelque chose… imagine quand ton héroïne influençable a le malheur d’écouter l’avis des autres… Et c’est parti !

Eh oui, plutôt que de psychoter parce qu’il ne se passe rien, l’héroïne peut psychoter à cause d’une tierce personne. Une tierce personne peut également vraiment jouer le rôle d’obstacle à leur amour. Rassurez-vous et défroncez ces sourcils, ça n’a rien de plus compliqué que ce qu’on a vu précédemment, en général les raisons et la logique des obstacles « réels » sont toutes aussi bidon que la logique des obstacles de la phase 1.

Les concurrents
Quoi de mieux pour mettre des bâtons dans les roues de la bicyclette du grand amour que de créer quelques concurrents ?

>>Concurrents du héros :
Les concurrents du héros sont tous ceux qui peuvent aimer l’héroïne (plus que le héros selon eux), ou que l’héroïne peut aimer. Dans votre shôjo, même si l’héroïne est donnée pour ordinaire et moche-jolie, elle va curieusement plaire finalement à des tas de personnes. Ce n’est pas rare d’ailleurs que, plus elle est insignifiante et vide, plus les amis du héros vont se tordre d’amour pour elle.
Dans le cas où vous avez un dark-héros, vous pouvez le mettre en valeur par un concurrent tendre, doux, compréhensif. Et vice-versa, si votre héros est un prince charmant plus fort et généreux que tout le monde, et ben le concurrent sera amoureux mais du genre à… je sais pas moi, à mutiler l’héroïne ? (c'est la preuve qu'il l'aime plus que le héros, car il peut l'aimer même si elle n'a plus qu'une seule main HAHAHA, qui dit mieux ?) :

"Attention chérie ça va trancher."

Le concurrent est souvent un abonné des chantages à la con, histoire de créer des problèmes imaginaires (« Sors avec moi où je salis les chaussures de ton mec ! Et tu lui dis pas que c’est moi qui t’ai imposé ça hein ! » « Sois tranquille, pour ce qu’on communique lui et moi, je doute qu’il l’apprenne un jour… »)

>>Concurrentes de l’héroïne :
Le choix est varié, mais on distinguera quelques figures principales :

- la méchante rivale :
Bon, la méchante rivale, ça se décline en plein de figures. En général elle est belle et perfide, mais elle peut n’être que perfide. Ce qu’on retient avec la rivale, c’est qu’il n’y a pas de limite à sa méchanceté, c’est tout à fait normal qu’elle cherche à tuer l’héroïne par jalousie (ben oui quoi, vous faites les étonnés là… je ne vois pas le problème). 
Elle est fourbe, sournoise, fait des coups en douce et manipule le héros et l’héroïne (ce qui n’est guère plus difficile que de se déclarer manipulateur en chef une fois débarqué au pays de Oui-oui). C’est elle qui surgit pour aller parler au héros sous les yeux de Sakumi puis inciter cette dernière à se faire des films ensuite. Elle se sent toute puissante d’un droit de cuissage qu’elle a sur le héros et dont Sakumi serait dépourvue. Elle donne naissance à des tas de petites actions/tensions qui vont animer notre shôjo.


>> Il faut savoir que l’idée maîtresse de notre shôjo (c'est à dire l'idée que la persévérance de l’héroïne fait qu’elle mérite le héros) donne souvent de mauvaises idées à la méchante rivale. La pauvre va croire que parce qu’elle a enduré une souffrance (et en porte encore les marques) elle mérite elle aussi l’amour du héros. Il faut dire pour sa défense que la notion de l’amour dans le shôjo est telle que cette façon de penser n’est pas tellement plus absurde.
"Higuratoshi ! J’ai chopé des vergetures rien que pour toi. Ça y est, tu m’aimes ?"

La méchante rivale peut être une ex du héros (le classique de l’ex qui revient), une groupie, ou encore, un de mes concepts préférés : la "connasse de meilleure amie". 

Sachant que le concept de l’amitié dans le shôjo c’est un peu comme le concept de l’amour. Vous êtes la meilleure amie de bidule parce qu’elle mange avec vous tous les midis et qu’en plus, elle vous sourit. Voilà. La connasse de meilleure amie est donc celle qui fait semblant d’être super copine avec l’héroïne (ou l’est vraiment) mais qui fera figure d’obstacle parce qu’elle sera rivale. Le fait que « l’amour » change sa personnalité du jour au lendemain pour en faire une psychopathe ne choquera bien sûr personne. Et quoi qu’elle fasse comme coup tordu, la grande bonté d’âme de l’héroïne fera qu’elle lui pardonnera tout :

« T’es en train de me soumettre à un viol collectif mais je comprends, c’est parce que t'es jalouse. Sans rancune.»

Le grand intérêt de la connasse de meilleure amie, c’est qu’elle peut exercer une pression en raison de son statut (« je suis ta meilleure amie, je te souris plein de fois et je t’accompagne aux toilettes !! Comment oses-tu me faire ça ? ») et créer encore des tensions et prises de tête qui n’ont pas lieu d’être (surtout si c'est censé être une meilleure amie). Rusé. 

- le groupe de (groupies) taré(e)s :
On a parlé du fan-club précédemment, c’est la même chose si ce n’est que parfois ça peut être juste un groupe de vilain(es) qui se réunit pour persécuter l’héroïne, lui dire combien elle est minable et la rendre encore plus méritante.
Pour une raison assez obscure, le groupe de femelles qui adulent le héros souhaite le vouer au célibat. Le devoir leur incombe de faire souffrir quiconque dans la gente féminine s’approcherait trop près de lui, et même quiconque il choisirait lui-même d’approcher. En général, il n’y a pas besoin vraiment d’une excuse valable pour aller persécuter Sakumi. D’ailleurs, en fait, il n’en faut pas. Il est essentiel que Sakumi soit toujours innocente et que ça soit à cause des autres qu’elle se retrouve dans une situation où le groupe de tarés intervient pour l’accabler et lui reprocher des choses selon des principes tenant plus ou moins debout (et dont bien souvent elle s'excusera).

« Comment ça t’oses aimer le même mec que nous ? On va te faire ta peau ! » « Mais… mais  pourquoi vous vous avez le droit et pas moi ? » « PARCE QUE ! »

- la rivale malgré elle :
C’est la nana si belle, si parfaite, populaire et élégante, qui va tellement bien avec le héros (son pendant féminin) et qui va donner un coup à l’amour-propre de l’héroïne (si tant est qu’elle en ait jamais eu). Elle peut être l’ex du héros si vous voulez en rajouter une couche. Son intérêt principal est qu’elle permet à Sakumi de psychoter encore plus et de faire n’importe quoi.

Voilà.

Bien sûr, on peut ajouter une flopée d’autres obstacles. Par exemple la méchante famille et/ou belle-famille (le héros est supérieur à l’héroïne, y’a des chances pour que son alliance avec cette infâme sous-femme de Sakumi pose quelques problèmes). 
Encore une fois, n’hésitez pas à aller dans l’incohérence psychologique la plus totale. Le héros devient de plus en plus doué dans son domaine grâce à l’amour de Sakumi ? Mais ses parents veulent les séparer et lui imposer un mariage sans amour comme ça euuuh… ce sera mieux. Bon ok, il va devenir mauvais et apportera la honte sur la famille mais hmm, comment dire hmm… c’est mieux quand même.

Bref. Les obstacles, réels ou imaginaires, sont innombrables et je ne pourrai tous les énumérer ici. N’oublie pas lecteur qu’il ne s’agit que d’un kit du shôjo facile et non du shôjo ultime. Je te donne quelques éléments grossiers et idées générales, il ne tient qu’à toi ensuite d’affiner ta construction et de la compléter. Tu as des pistes, tu as de quoi t’entraîner. Que la joie te submerge et puisses-tu avoir une pensée émue à mon égard quand tu signeras « fin » en bas de la dernière case.

Je vais pouvoir aller prendre mon bus pour me rendre au supermarché, c'est qu'il va être cinq heure, faudrait quand même pas que je rate l’heure de pointe.



(Source des extraits de mangas : http://www.mangareader.net, http://www.mangafox.com/, http://manga.animea.net/)

5 commentaires:

  1. J'ai dévoré vos articles: ils sont très pertinents et je tiendrai compte de vos précieux conseils, Vea!
    Merci! Je vais pouvoir écrire un super shôjo qui, je l'espère, deviendra un best seller et sera adapté en anime! Je vous dédierai le 1er volume! ^_^

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  2. j'adore votre blog Vea je vais suivre vos conseil et essayé d'écrire un shojo j'ai déjà commencer (sur une feuille de brouillon) a crée mon héroïne,grâce a vous, je vais pouvoir crée un shojo qui je l’espère plaira a beaucoup de monde

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  3. mais par contre je n'ai aucune idée du titre que je vais pouvoir lui donnée(au shojo)pourriez vous me dire comment trouvez un titre ?

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  4. MEUHAHAHA! Si jamais un jour j'arrive a faire une parodie de shojo, je te ferais une belle dédicace (j'ai du mal à écrire de truc aussi insensé en étant sérieuse)

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